mercredi 17 février 2016

3/ Corée

Belle moto
1 juillet

La première fois de ma vie que je change de jour sans passer par la nuit. En effet, pendant les 11 h de vol, nous passons la ligne de division des heures. 16 heures de décalage, je suis complètement azimuté. A l’arrivée, j’ai voulu prendre un hôtel près de l’aéroport pour être sur place pour dédouaner ma moto. J’en choisi un pas trop cher, bon quand je dis pas trop cher,  le prix de la chambre est tellement ridicule que je sens bien l’embrouille venir et me tomber dessus en pleine figure. Résultat je me retrouve dans les rizières à 3/4  d’heure  de ce que je souhaitais. Cette fois, mauvaise pioche.

Un certain nombre de problèmes plus graves se posent dès mon arrivée et le challenge est là devant moi bien clair : sang froid et pas de panique. 

Question climat, c’est la grosse chaleur à Séoul. Avec le décalage horaire, je suis réveillé depuis 4h du matin et déjà ma 3ème douche. Je suis en eau avant même de mettre le nez dehors et avec mon équipement de moto au niveau de la fraîcheur, je crains qu’il va y avoir beaucoup à redire. 

Un immense merci à vous tous qui vous intéressez à mon voyage, vous vous êtes connectés plus de 2000 fois déjà. C’est impressionnant et vos clics me remontent le moral quand le blues est là et que la java s’en va. Merci, merci, merci.

Première journée passionnante dans les bureaux des douanes. On attend des heures puis pour passer ma moto en franchise temporaire je dois régler une caution considérable. J’avais prévu pas mal de chose mais je n’avais pas vu venir le coup de cette caution. Là, c’est la danse des cartes de crédit qui commence dans toutes les agences bancaires de l’aéroport de Séoul pour réunir ce qui m’est demandé. Vu ma fébrilité à courir les comptoirs, les gens doivent sûrement me prendre pour un escroc. Je suis un peu inquiet de tirer sur mes cartes de cette manière car j’ai peur d’arriver au bout de mes autorisations d’encours. Je ne peux pas trop tirer sur les sommes en liquides que je porte sur moi car en Russie et en Asie Centrale, ils ne prennent pas les cartes de crédit, tout en liquide.  Le système du carnet de passage qui est également un système de caution mais que l’on met en place dans son pays d’origine avant de partir, est quand même plus pratique.

Retrouvailles avec Mr J.M Lee qui était un de mes gros fournisseurs du temps d’ABI et qui m’a énormément aidé à préparer ce voyage en Corée. Il n’a pas changé sauf pour la Mercedes énorme qu’il conduit maintenant : je suis content pour lui que mon départ des affaires ait correspondu à une belle reconstitution de ses marges. Nous avions fait de bons coups ensemble. Je me souviens entre autre avoir pris le marché de la signalisation des tombes dans les cimetières italiens. Des millions de lampes. Un truc de dingue ! Enfin un type adorable que j’ai pratiqué pendant 15 ans et sur qui je peux compter en cas de pépin.

Superette? non, église!

Petit clin d’œil sur une église qui occupe un étage dans un immeuble commercial en face de mon nouvel hôtel. Le clocher est là, sur le toit, et on peut aller se recueillir entre une séance chez le coiffeur et le marché pour le déjeuner du dimanche midi.

2 juillet

La mousson sur entrepôt

En plus de la caution pour les douanes, il y a une deuxième chose que je n’ai pas vu venir: la mousson. Apocalyptique : des orages terribles d’une violence inouïe qui vous réveillent brutalement sur le coup de 4 heure du matin. Coupure d’électricité  qui n’alimente plus la serrure électrique de la chambre et je me retrouve prisonnier: impossible de sortir.



Alors que les vannes du ciel sont largement ouvertes et nous balancent des trombes d’eau sur la tête, mon déclarant en douane m’annonce que le remontage de la moto se fera dehors. Là je sens   que la journée s’annonce mal et que je vais tomber dans une vraie galère. Une légère irritation voire un petit agacement me prend : le responsable de l’entrepôt de Korean Air, un garçon intelligent et qui sent bien les mauvaises vibrations n’aura de cesse que de me donner satisfaction.  

La roue de devant, elle est où?
Maintenant comme on pouvait s’y attendre le remontage de la moto est pire que ce à quoi je m’attendais. L’horreur ! Il m’ont mis tous les boulons et les écrous dans un sac et avec ça démerde toi, Joseph. La roue avant est démonté. Comment remet-on ce truc là ! J’ai envie de pleurer. Heureusement que l’intéressé est loin à Seattle car, il y a une ambiance de meurtre avec préméditation dans l’air  avec circonstances aggravantes pour actes de barbarie. Pendant ce temps la pluie tombe de plus belle. Je n’ai jamais vu une chose pareille. Un mur d’eau. 

Assistants mécano improvisés


Finalement grâce aux 2 personnes détachées par le transitaire pour m’aider et qui ont été extraordinaire, nous y arrivons et au bout de 6 heures, la moto démarre comme une moto allemande.




Maintenant une histoire de fou! Imaginons que l’aéroport de Roissy soit sur une île, que cette île ne soit reliée à Paris que par 2 autoroutes, qu’il est interdit de prendre les autoroutes en moto en France, qu’il existe bien une liaison par ferry mais qui est fermée actuellement sans aucune information disponible sur la réouverture. Question: on fait comment pour quitter Roissy? On s’installe à l’hôtel IBIS Charles de Gaulle en faisant travailler ses méninges.
Voilà très exactement ma situation depuis 24 h. Elle est plutôt cocasse et l’humour est le meilleur moyen de gérer cette situation. Enfin, bon, on peut toujours essayer.

6 juillet



Enfin le ferry!

Le seul moyen qui me vient à l’esprit pour faire passer cette moto sur le continent est de la mettre sur un camion. Comme elle pèse 350 kg il faut en trouver un équipé d’ un bras hydraulique. On me parle d’une disponibilité la semaine prochaine! Par acquis de conscience, je demande à la réception de l’hôtel d’appeler la compagnie de ferry au cas où ! Miracle un bateau part dans une heure et demi. Sauvé !


100 000 au compteur

Le compteur de la moto m’indique qu’ elle a dépassé les 100 000 km. Quelle machine formidable! De l’Australie à la Chine,  puis l’Amérique, tant de voyages avec elle sans problème. Enfin je touche du bois, on verra à l’arrivée à Paris.




Il y avait 3 choses de prévues pendant mon séjour en Corée : d’abord la visite du site de l’armistice entre les 2 pays à Panmunjoem où je me rends avec les plus grandes difficultés de circulation hors autoroute. A 30 km du site  je me fais éconduire par les militaires à un poste de contrôle. Donc demi tour droite et que ça saute ! 
Ensuite visite du cimetière militaire français à Pusan à l’extrême sud est du pays, pour me recueillir sur les tombes de nos soldats complètement oubliés depuis 60 ans. Là, à 8 km de la ville en pleine banlieue industrielle, mon GPS décide que finalement Pusan n’existe plus, qu’elle a déménagé, bref elle n’est plus là. Arrivé par le sud, j’essaie de passer par l’ouest puis le nord, rien n’y fait, je n’y arrive pas. Pour mémoire, je n’ai pas toujours pas accès aux autoroutes et autres périphériques et je galère toujours sans GPS dans les ruelles de la ville à la boussole !!! Épuisé, trempé par les pluies de mousson qui m’accompagnent depuis la veille, finalement je renonce. Cela fait 2 ans que j’avais préparé cette visite. Mes pauvres soldats, une fois encore, on les laisse tomber, j’en suis malade de déception. J’essaie de trouver un hôtel pour me poser et y aller en taxi. Même cela s’avère impossible. 

A force de me crisper sur mon guidon j’ai des ampoules plein les mains. Totalement écœuré, je reprends la route vers le nord toujours sous la pluie pour arriver avec un jour d’avance à Donghae. Je m’arrête dans une station service pour me mettre à l’abri quelque instants et le garagiste me voyant dans un drôle d’état, trempé et grelottant,  m’apporte un chocolat chaud, puis me conduit dans une petite cahute sur le côté pour une bonne soupe.

La bouffe, c'est bon pour le moral

La nourriture et la gentillesse me réchauffent et le corps et le cœur  ces gens sont adorables. A l’entrée de la ville, je me fais arrêter par les flics qui m’explique que les moto sont non seulement interdites sur les autoroutes mais également sur les simples 4 voies. Là, il ne faut pas insister, ne pas se mettre en colère même si la coupe est pleine à ras bord depuis 1 semaine, mais puisque c’est comme ça ici, il faut partir là maintenant, m’embarquer sur mon bateau, vite.

Lequel bateau est la troisième raison pour laquelle je suis en Corée et vu comme c’est parti depuis une semaine, je croise les doigts pour que tout ce passe bien. 


superbe poisson
au bord de la plage


Dernière journée de préparatifs et le déjeuner d’un excellent poisson grillé sur une petite plage repérée la veille.




Je connais bien la Corée pour y être venu des dizaine de fois quand j’étais en activité et j’aimais bien venir travailler ici. Les gens y sont absolument adorables et sérieux en affaire. Jusqu’à aujourd’hui je n’en avais que d’excellents souvenirs. Il faudra que le temps passe un peu pour relativiser les soucis que j’ai traversés cette semaine. 
Disons que le tourisme et la qualité de vie sont les dernières priorités des coréens qui ont mis le paquet dans le lourd, automobile, construction, chantier naval, électronique, etc . . .
Il sont 50 millions d’habitants pour une surface 6 fois plus petite que la France, il faut nourrir et loger tout ce monde. Tout les mauvais côtés d’un développement à outrance sont réunis. Comme en Chine. A part quelques rares coins dans les montagnes du centre et de la côte, c’est hideux. 

Un épisode malgré tout réconfortant alors que je traverse la capitale Séoul dans des embouteillages gigantesques, des feux tous les 100 mètres, on n’avance pas, ça dure depuis des heures, la pollution et voilà que la moto qui commence à chauffer. Danger. Dans un quartier de banlieue, je m’arrête dans une ruelle immonde bordée de petits immeubles sales au béton noirci par la crasse. J’attends en somnolant assis sur la moto qu’elle veuille bien refroidir. Et soudain,  j’entends venant de l’immeuble de l’autre côté de la rue, aussi sale et délabré que ses voisins, un piano, quelqu’un joue un morceau de fort belle manière dont je ne saurai dire si c’est du Beethoven ou du Mozart. Tout le monde sait qu’à part les Rolling Stones mes connaissances en musique sont nulles. Cette rencontre musicale totalement incongrue à cet endroit est incroyable. Je suis subjugué. Tant qu’ on jouera du Beethoven dans les ruelles de la banlieue de Séoul, on aura toujours raison de croire en l’humanité.

Bon malgré tout, à l’évidence, c’est le dernier endroit où j’emmènerai ma Béatrice en vacances.

Vite mon bateau!
Finalement si on regarde de plus près, 5 heures d’attente de 9 h du matin à 14 h, dit comme ça, effectivement cela paraît un peu long. Mais si on considère que cela fait 2 heures plus 3 heures tout de suite on s’aperçoit que 2 heures ce n’est vraiment pas grand chose avec les formalités douanières pour ma moto. Que si je déjeune vers  11h30 suivi d’ une petite sieste dans les excellents fauteuils de la compagnie DBS, les 3 heures restantes, je ne pense pas qu’elles vont durer aussi longtemps que ça non plus.


Trajet vers Vladivostok


On m’annonce avec un grand sourire que le bateau partira à l’heure mais qu’il y aura malgré tout un retard peut être d’une demi-journée à l’arrivée à cause de manœuvres militaires russo-chinoise quelque part dans le secteur.  Hm ! Hm ! Tout ça est finalement très amusant. Pourvu qu’ils ne se trompent pas de munitions et qu’ils n’utilisent que des cartouches à blanc. 




Bien arrimée, elle ne bougera pas

Accueil VIP à la compagnie DBS. Mr Kang avec qui je suis en relation depuis décembre 2012 est là, je suis attendu, salon particulier, petits oignons etc... Tout ça est extrêmement agréable. Les formalités douanières sont expédiées sérieusement mais rapidement. Puis c’est l’installation de la moto dans l’antre du navire. 




Au moment de quitter la Corée et de partir vers la Russie, je m’embarque en terre complètement inconnue. Je ne sais pas grand chose de ce qui m’attend là-bas. En particulier l’accès à internet n’est sûrement pas aussi facile qu’il l’a été depuis le début de mon voyage. 

Ne vous inquiétez pas. A partir du moment où vous voyez que je progresse sur la carte DELORME c’est que tout va bien. La première semaine d’août, je serai à la chasse au Kazakhstan donc ma balise sera déconnectée pendant 5 ou 6 jours. D’ici là je trouverai sûrement un Cyber café ou un autre moyen de communiquer.

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